« Les monstres existent, mais ils sont trop peu nombreux pour être vraiment dangereux ; ceux qui sont plus dangereux, ce sont les hommes ordinaires, les fonctionnaires prêts à croire et à obéir sans discuter », écrivait Primo Lévi, ancien pensionnaire des camps de concentration nazis.

Ceux qui observent l’histoire politique du Cameroun ont certainement remarqué que seule la lutte, la désobéissance ont permis de conquérir quelques petits espaces de liberté dont nous pouvons jouir.

Le 19 février 1990, les éléments de la police politique de Yaoundé alors dirigée par le sinistre Jean Fochivé arrêtent l’avocat et ancien bâtonnier Me Yondo Black Mandenguè et neuf autres personnes dont Anicet Ekane, Henriette Ekwe, Albert Mukong, Francis Moutome, Rudolphe Bwanga, Gabriel Hamani, Julienne Badjé, Charles René Djon Djon, Vincent Fekom. Incarcérés à la prison centrale de Kondengui, ils sont accusés d’avoir tenu des réunions clandestines, d’avoir fabriqué et distribué des tracts hostiles au pouvoir et injurieux envers le chef de l’Etat et d’incitation à la révolte. La réalité est qu’ils sont soupçonnés d’avoir voulu lancer un parti politique.

L’affaire Yondo Black va donner lieu devant le tribunal à une plaidoirie historique de Me Bernard Muna. Extrait : « A supposer que les 10 détenus aient effectivement organisé des réunions clandestines, qu’ils aient distribué des tracts critiquant le gouvernement. La vraie question qu’il faut se poser est celle de savoir pourquoi ils ont tenu leur réunion de manière clandestine, pourquoi ils ont critiqué le gouvernement avec des tracts anonymes alors que le droit de tenir des réunions et de former des associations est garanti par notre Constitution ainsi que par la Charte internationale des droits de l’homme. La réponse à ces questions est simple : au Cameroun au cours des 25 dernières années, les citoyens qui ont essayé d’exercer leurs droits ont été arrêtés, torturés et emprisonnés. »

Si Yondo Black, Anicet Ekane, Henriette Ekwe et les autres avaient sagement attendu d’obtenir des autorisations de manifestation publique – comme on le demande aujourd’hui à Kah Walla, Me Ndoki et les autres -, on peut être certain que le Cameroun serait encore sous le régime du parti unique. Mais des combattants ont bravé leur peur, ont fait fi des critiques et ont forcé la main à un pouvoir qui vivait dans le confort du monolithisme. Oui il faut désobéir. La question aujourd’hui n’est même pas de savoir pourquoi les gens se révoltent, mais pourquoi ils ne se révoltent pas assez.

Et pour reprendre Frédérique Gros [Frédéric Gros, Désobéir, Albin Michel, Paris, Sept 2017], « la désobéissance face à l’absurdité, à l’irrationalité du monde comme il va, c’est l’évidence. Elle exige peu d’explications. Pourquoi désobéir ? Il suffit d’ouvrir les yeux. La désobéissance est même à ce point justifiée, normale, que ce qui choque, c’est l’absence de réactions, la passivité ».

 

Jean Bruno Tagne

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